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dimanche 24 avril 2011

Urbi et orbi

En ce dimanche de Pâques, il me semblait dommage que cet édito ne soit pas lisible sur le net :

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Soufflement.

« Pourquoi restez-vous là plantés à regarder le ciel ? »

-Vous les cloîtrés, les apeurés, les confinés entre les murs de vos églises, de vos chapelles, de vos cathédrales ?

« Pourquoi, restez-vous là plantés à regarder le ciel ? »

-Vous les emmurés, les enfermés, les emprisonnés dans vos langages codés, dans vos traditions du passé, dans vos ressassements, dans vos patois de Canaan ?

« Pourquoi restez-vous là plantés à regarder le ciel ? »

-Vous les pétrifiés en statues de sel blanc, les cadenassés dans vos théologies d’hier, les verrouillés dans vos dénominations ecclésiastiques, les barricadés dans vos dogmes moyenâgeux ?

« Pourquoi restez-vous là plantés à regarder le ciel ? »

Mais le vent se lève.
Et le feu les brûle.
Et le bruit les saoule
Et ils sortent.

Et ils sortent de leur repaire, de leur sacristie, de leur salle d’attente, de leur refuge.
Et ils sortent, dans les rues, sur les places, sur le net, là où sont assemblés les Parthes et les Noirs, les Mèdes et les Beurs, les élamites et les sahéliens, ceux de la Judée et les Arabes, ceux de la Capadoce et les Turcs, ceux de la Phrigie et les Roms, ceux de la Pamphilie et les Afghans, ceux de la Libye cyrénaïque et les Chinois ceux de l’Ailleurs et les autochtones.
Et ils sortent, et ils parlent.

Et ils leur parlent.
Et ils parlent leur langue, leur langue maternelle, leur langue de tous les jours, celles de l’autre rive, celle de leur temps.
Et ils parlent aux quatre coins des langues contemporaines, l’Informatique et le Face-book, Le Magazine et la Télé, l’Email et le Tweeter, la Pub et la Vidéo.
Et ils parlent leurs idiomes de travailleurs et d’émigrés, de chômeurs et de cadres dynamiques, de traders et de sans papiers, de sans logis et d’exilés, de réfugiés et de retraités.
A tous ils parlent leurs patois domestiques.
Et ils parlent et ils partagent.

Et ils partagent.
Et ils partagent la parole, le pain et l’espérance.
Ils partagent avec ceux qui restent décontenancés, étonnés, stupéfaits d’entendre annoncer les merveilles de Dieu, et qui s’esclaffent « ils sont pleins de vin doux ».
Ils partagent et rejoignent ceux qui parlent la langue des aveugles, qui relèvent les décombres, qui accueillent les orphelins, qui pansent les plaies, qui accompagnent les mourants.
Ils partagent et s’enthousiasment d’apprendre que l’avenir n’est pas sans issue, que l’oppression des puissants n’est pas la norme de vie, que la dictature des riches n’est pas inéluctable, que la tyrannie de la Technique n’est pas fatale et qu’un espace de liberté est ouvert.

Que le feu nous assoiffe.

Nous assoiffe de l’eau de vie. « Il faut être toujours ivre. » dit le poète. Enivrons-nous de l’eau qui donne soif du temps qui vient. Enivrons–nous de la voix qui rassemble les peuples. Enivrons-nous du souffle qui soulève les montagnes, qui roule la pierre, qui multiplie les pains.

Enivrons-nous et que l’on dise « Ils sont ivres-vies. »

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